Traversée du lac à la nage, un rêve d’enfant et une renaissance

En juillet 2024, Anouchka Trancart a traversé le lac Léman à la nage. Une première étape qui l’a poussée à s’inscrire pour une traversée du Détroit de Gibraltar. 

La jeune femme de 24 ans qui me reçoit en cette fin d’après-midi n’a pas le profil de la nageuse hypermusclée et athlétique. C’est tout en finesse qu’elle me raconte les étapes qui l’ont conduite à nager de Saint-Gingolph à Vevey l’été passé. Ce jour là, c’est le rêve d’une petite fille qui s’est réalisé. 

Des projets.

 À 14 ans, Anouchka arrive en Suisse, à Saint-Prex, depuis le Sud de la France où elle est née. Elle pratique le ski alpin en compétition. Mais elle est attirée par l’eau. Chaque fois qu’elle regarde le lac, elle se dit qu’elle a vraiment envie de le traverser. Après ses études d’ingénieur en environnement, elle s’offre une pause. Intéressée par la psychologie, elle réalise un travail d’introspection. Il en ressort que le sport, l’eau et le surf seront les éléments centraux avec lesquels elle envisage de construire sa vie. 

Au Portugal, où elle surfe sur les rouleaux de l’Atlantique, l’envie lui prend de nager de Peniche aux îles Berlengas (16 km). Elle a également des projets de compétition de surf.

Rêves brisés.

 Malheureusement, au printemps 2023, un accident vient remettre en question tous ses projets sportifs. Avec quatre vertèbres fracturées, Anouchka voit ses rêves tomber à l’eau et pense ne plus pouvoir pratiquer ses sports favoris. Après une longue convalescence, son travail la ramène en Suisse, à Vevey. Son rêve d’enfance, la traversée du lac à la nage, refait surface. 

Inspirée par son cousin Thibault Trancart, skieur alpin paralympique aveugle, qu’elle a d’ailleurs guidé en compétition, Anouchka sait que c’est possible. 

Rêve réalisé.

 Un matin de juillet 2024, Anouchka traverse le lac en bateau en direction de Saint-Gingolph. Le trajet lui parait déjà très long. Comment va-t-elle pouvoir, à la nage, regagner Vevey et ses bâtiments si minuscules dans le lointain ? 

Deux heures plus tard, elle nage quelque part le long des 7,8 km qui séparent les deux rives. Les trente premières minutes ont été difficiles. Elle a douté. Mais maintenant, elle est dans un état second, méditatif, hors du temps, concentrée sur l’alternance des nuances de bleu, celle de l’eau et celle du ciel quand elle lève la tête pour respirer. Elle accepte les douleurs de son corps et voit défiler dans sa tête les étapes de sa vie, comme un voyage intérieur. 

Bien accueillie !

Anouchka est accompagnée d’un ami qui nage avec elle. Un autre les suit en paddle et un bateau veille à leur sécurité. La nageuse est seule avec son rêve qui se réalise, mais cette présence l’encourage et la motive. Lors d’une pause de cinq minutes pour manger une banane, son ami lui indique qu’ils ont quitté Saint-Gingolph depuis deux heures ; pour Anouchka, c’est comme si quelques minutes s’étaient écoulées, elle a perdu la notion du temps. 

À l’approche de la rive suisse, leur parcours croise celui d’une régate de voiliers. Accompagnée de son ami en paddle, Anouchka reçoit des encouragements chaleureux de la part des équipages alors que son ami nageur, distancé, essuie les reproches des skippers. A-t-on idée de nager au milieu d’une course de bateau ? Trois heures et trente minutes se sont écoulées quand Anouchka et ses amis prennent pied sur les quais de Vevey. 

Un nouveau défi.

 Après avoir frôlé la paralysie, la jeune femme voit cette traversée à la nage comme une renaissance. Tout parait à nouveau possible. Elle apprend à écouter son corps, à se surpasser sans se faire mal. Après le surf, elle s’intéresse à l’apnée qu’elle pratique à l’occasion, mais un nouveau projet se profile à l’horizon : relier l’Europe à l’Afrique à la nage. La traversée du Léman lui a laissé une sensation d’accomplissement et, un peu après, un sentiment de nostalgie. Elle a besoin d’un nouveau défi et la traversée du détroit de Gibraltar est un autre rêve qui couve dans sa tête depuis quelques années. Le moment est venu de se confronter au détroit avec ses seize km de vagues, de courants et ses cargos porte-conteneur. 

Elle sent qu’elle en est capable. 

Anouchka est inscrite sur une liste d’attente. La date exacte de sa traversée qui aura lieu en été 2025 ou 2026,  devrait être fixée en novembre de cette année. Elle sera accompagnée de trois autres personnes et encadrée par un bateau et un zodiac. 

Réflexions philosophiques.

Dans le silence des eaux du Léman, Anouchka s’est sentie en symbiose avec la nature, connectée à la planète. Elle avait l’impression de flotter dans une légèreté totale bien éloignée de l’agitation de la société. Une distance qui lui inspire des réflexions sur les changements de notre climat et sur les responsabilités de l’homme vis-à-vis de son environnement. 

Pour Anouchka, l’humain doit se reconnecter à la nature et à lui-même, comprendre que le rythme de notre société occidentale n’est pas soutenable pour la planète, ni pour ses habitants. On peut créer un monde magnifique sans détruire la planète, sans s’auto-détruire tout en vivant mieux. 

La jeune ingénieure en environnement voit le renoncement aux biens matériels et la décroissance non comme un sacrifice, mais comme une opportunité de croissance spirituelle et de développement personnel. Si tout est possible pour un individu, il devrait en être de même collectivement à l’échelle de la société. 

Texte : Gilles Scherlé

Photos : Archives Anouchka Trancart 


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