Après une saison pleinement réussie, Damien Revey a décidé de fermer la page compétition de ski. Il ouvre une nouvelle page professionnelle.
Planete-Sports est allé à la rencontre de Damien Revey, suite à l’annonce de sa décision de mettre un terme à sa carrière sportive. Dans cette interview exclusive, il nous offre un regard introspectif sur le passage d’une vie d’athlète à celle d’entrepreneur, tout en conservant intacte sa passion pour le ski.
Du tac au tac en toute franchise.
Damien, peux-tu nous parler des moments les plus marquants de ta carrière en ski alpin ? Quels souvenirs gardes-tu de tes années en compétition ?
Les moments les plus marquants, je dirais, quand j’étais plus jeune, étaient les championnats valaisans. Je ressentais cette bonne pression au fond de moi. C’était également les courses qui figuraient le plus souvent dans nos discussions entre les jeunes skieurs.
Un autre moment marquant est ma première participation à une coupe d’Europe. Le moment où tu es au souper avec des athlètes d’exception, l’ambiance de la course et le professionnalisme de tout le staff.

Aucun regrets, que de merveilleux souvenirs.
Je garderai des souvenirs incroyables de ma carrière, comme les camps dans le nord de l’Europe durant lesquels tu es vraiment concentré sur le travail et la progression, les paysages incroyables et les heures de route à regarder par la fenêtre, car tu es fasciné par l’horizon.
Je garde aussi en tête les magnifiques rencontres. Dans le ski, nous sommes comme une petite famille.
Quelles ont été les principales raisons qui t’ont poussé à mettre un terme à ta carrière de skieur de compétition ?
Il y a, comme souvent, beaucoup de raisons qui poussent à mettre un terme à une carrière, que ce soit sur le plan sportif ou même dans nos vies professionnelles au travail.
Je dirais que la raison principale aura été la sélection concernant les cadres de Swiss-Ski, quand elle est sortie mi-avril. A ce moment, je me rappelle m’être parlé à haute voix en me disant : « OK, là, je vais devoir réfléchir ». Réfléchir…, car lorsque j’ai vu que les critères, pour certains athlètes, n’étaient pas aussi stricts que pour d’autres, cela semblait pour moi impossible d’y accéder. J’ai eu des appels avec mes entraîneurs et je leur ai partagé mon point de vue. J’ai eu beaucoup de chance de les avoir, car ils ont compris et approuvé ce que je pensais.
Une autre raison aura été que le plaisir n’était plus vraiment de la partie. Je suis quelqu’un qui a toujours fonctionné au plaisir, car pour moi, c’est l’ingrédient principal lié à la performance.
As-tu ressenti une pression particulière, qu’elle soit liée à la performance ou à la gestion des blessures, qui a influencé ta décision d’arrêter ?
J’ai eu la chance de n’être jamais passé par la case « blessure » durant ma carrière et j’en suis très heureux.
Chaque athlète a de la pression. Moi, je la gère plutôt bien et j’appréciais ce sentiment de petite pression dans ma tête. Au moment d’arrêter, je n’ai ressenti aucune pression. Je me suis mis dans ma bulle durant quelques jours pour prendre une décision qui ne regardait que moi.
La transition vers l’entreprise familiale était-elle un projet de longue date, ou était-ce une opportunité qui s’est imposée avec le temps ?
Non, ce n’est pas du tout un projet de longue date. Je me focalisais sur ma carrière sportive et j’avais vraiment à cœur d’arriver au plus haut niveau. Mais pour moi, il était très important d’avoir une porte de sortie pour le jour où cela se terminerait au niveau sportif. J’ai connu des collègues qui ont dû renoncer au ski de haut niveau après des blessures. Pour en avoir discuté avec eux, il était clair pour moi que l’après-carrière méritait une réflexion sérieuse, même lorsqu’on est encore en pleine activité.

La combi est raccrochée définitivement dans la pièce à souvenirs.
Le ski reste-t-il une passion pour toi, même si tu n’es plus en compétition ? As-tu des projets pour rester impliqué dans le milieu du ski, d’une manière ou d’une autre ?
C’est et cela sera toujours ma passion la plus grande. Je continuerai à suivre de très près mes amis et anciens collègues. J’espère les voir un jour évoluer au plus haut niveau, c’est tout ce que je leur souhaite. Pour l’instant, j’ai une grande envie de prendre du recul avec ce monde-là. Je ne me vois pas entraîneur dans le futur pour être honnête. Mais pourquoi pas, partager mon expérience avec les plus jeunes quelques fois.
Quels ont été tes plus grands défis en tant que sportif de haut niveau, tant sur le plan mental que physique ?
Sur le plan mental, je n’ai pas les mots pour décrire ce que ça m’a apporté. C’est quelque chose de vraiment fort lorsqu’à des entraînements, on pense être au bout de ce qu’on peut produire, mais que l’on y retourne par soi-même pour se faire mal. Le mental n’est pas là depuis notre naissance, on doit le forger jour après jour.
Sur le plan physique, les plus grands défis auront été de se dépasser jusqu’à s’effondrer par terre. J’ai un souvenir, lors d’un camp physique en Provence en 2019, en période de canicule. Nous avions déjà fait trois jours de sport intense et ce jour-là nous sommes partis pour faire un triathlon revisité. 15 km de roller, 10 km de course, 60 km de vélo ainsi que 21 km pour grimper le Mont Ventoux. Le tout sous une température de plus de 40°C. Ce fut l’effort le plus dur de ma vie, mais il m’a apporté tellement, pour beaucoup de choses par la suite.

Précision et concentration dans son métier comme en ski.
Comment vis-tu la transition entre ta carrière sportive et le monde de l’entreprise, est-ce un environnement complètement différent, ou y trouves-tu des similitudes ?
Pour être honnête, je le vis bien. Je me suis beaucoup occupé la tête, car j’en avais grandement besoin durant l’été. Nous avons commencé les travaux du nouveau local de la jeunesse d’Anniviers et j’ai donc passé pas mal de soirées à travailler avec les jeunes de ma région. C’était des moments joviaux et durant lesquels je ne pensais plus trop au ski.
Si tu pouvais revenir en arrière, changerais-tu quelque chose dans ta carrière sportive ? Y a-t-il des décisions ou des opportunités que tu aurais saisies différemment ?
Je ne changerais rien du tout. Je suis très fier de tout ce que j’ai fait et d’avoir réfléchi durant les prises de décisions importantes.
Quelles compétences ou leçons tirées du sport de haut niveau, t’aident aujourd’hui dans la gestion de l’entreprise familiale ?
Je ne gère pas encore totalement la menuiserie de mon oncle. On fera le passage de témoin tranquillement, mais je dirais qu’il y a beaucoup de similitudes dans les compétences à avoir. Dans le ski, on est très organisé, mais on se doit aussi d’avoir une flexibilité par rapport à d’éventuels changements de programme. Je le retrouve beaucoup dans la gestion des chantiers et des différents travaux.

Le passage de témoin par son oncle Jacky Revey.
La deuxième chose qui me vient du ski serait la rigueur : être très professionnel dans tout ce que j’entreprends et y aller jusqu’au bout.
Quels sont tes objectifs et tes ambitions pour cette nouvelle étape de ta vie dans l’entrepreneuriat et comment vois-tu ton avenir dans ce domaine ?
Mes objectifs sont d’être heureux dans mon travail et toujours très bien organisé, comme je l’ai été durant toute ma carrière. Je n’ai pour le moment pas d’ambition particulière. Je suis très heureux comme ça et je me souhaite de continuer sur cette lancée.

Damien pourra profiter pleinement de ces belles couleurs automnales de sa vallée.
Envisages-tu à ton tour, en tant qu’entrepreneur, de soutenir à l’avenir, un jeune dans son projet sportif ?
Bien sûr, car j’ai eu une chance inouïe d’être soutenu par mon oncle, qui était également mon formateur. Il m’a apporté tellement sur le plan professionnel, mais également sur le plan humain. C’est pour cela que j’aimerais le remercier énormément, car sans lui, je n’aurais jamais vécu tout ça et je suis content de continuer à travailler à ses côtés encore aujourd’hui.
Texte et photos : Iris Curdy et photos d’archives de Damien Revey